🧨 L'inflation est-elle notre véritable ennemi ?
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🧨 L'inflation est-elle notre véritable ennemi ?
Dans notre dernier décryptage, on vous a ouvert les yeux sur la création monétaire.
Si vous ne l’avez pas lu, on vous conseille d’aller y jeter un œil pour comprendre la suite :
On vous a raconté comment les banques commerciales peuvent créer de l’argent ex nihilo, comment la monnaie scripturale circule dans un système de promesses encadrées par des ratios prudentiels, et pourquoi ce que vous voyez sur votre appli bancaire n’existe….pas tout à fait.
Mais une fois qu’on sait ça, on se pose vite une autre question : Comment les Banques centrales interviennent elles dans tout ce cirque ??
Bah oui, parce que c’est bien beau de savoir que les banques commerciales créent de la monnaie et font donc tourner l’économie, mais les Banque centrales, elles servent à quoi alors ? Elles ne sont pas censées réguler l’économie ? Et nous protéger des crises ?
On vous rassure, c’est le cas. Mais pour comprendre comment elles tentent de nous protéger, il faut d’abord comprendre : contre quoi ?
(You name it) flation
📈 L’inflation : Ennemi public numéro 1 ?
Petit rappel de base : L'inflation, c'est tout simplement l'augmentation généralisée des prix.
Si aujourd'hui Morgane produit 100 pommes et en vend une à Jordan pour 1€, et que demain elle lui vend une pomme à 1,10€, alors on a une inflation de 10%.
En général, cette hausse des prix est mesurée pour les biens et services de la vie quotidienne : alimentation, électroménager, téléphonie, loyers, énergie... Mais pas les actifs financiers ou l'immobilier, même si eux aussi flambent parfois.
Pourquoi ? Parce qu'on considère que ce ne sont pas des dépenses régulières pour le ménage moyen. (Spoiler : on est d'accord, c'est discutable.)
Par exemple, le prix des logements n'entre dans l'indice des prix que par le biais des loyers. Donc, si l'immobilier grimpe mais que les loyers stagnent, l'inflation officielle ne bouge pas. Ça explique pourquoi certaines bulles immobilières peuvent enfler sans que l’on parle d'inflation au sens économique strict.
Mais du coup, est-ce que créer de la monnaie = inflation automatique ?
Pas vraiment. Empiriquement, ça ne colle pas. La masse monétaire en zone euro a été multipliée par 5 depuis la création de l’euro, alors que les prix, eux, n'ont été multipliés que par 1,4. Autrement dit, il y a eu 3,5 fois plus de monnaie injectée que de hausse de prix observée.
Ok, mais alors pourquoi Mojo, dis-nous ? Tout simplement parce que toute la monnaie créée n'est pas utilisée. Une partie dort sur des comptes courants, et une autre sert à acheter des actifs financiers plutôt que des pommes (donc c’est là que les bulles se forment).
Et surtout, même si les entreprises savaient qu'il y a plus d'argent en circulation, elles n'ont aucun moyen de savoir si cet argent servira à acheter leur produit. Dans un monde ultra varié où les consommateurs sont volatils, les goûts changent et la concurrence est rude, les prix ne suivent pas la masse monétaire de manière automatique.
Autre mythe : celui de la production fixe.
Dans notre exemple, on suppose qu’il y a 100 pommes produites, point. Mais dans la vraie vie, les usines et les entreprises ne tournent jamais à 100%. Elles gardent de la marge, elles peuvent accélérer, réagir, produire plus si la demande augmente. Donc même s’il y a plus d’argent dans les poches, cela ne provoque pas toujours une hausse des prix : cela peut, mais cela peut aussi juste provoquer plus d’activité.
Et après tout, on en a bien besoin de cette monnaie de toute façon. La création monétaire, c’est même un carburant essentiel à la croissance économique. Sans elle, pas d’investissements, pas de projets, pas de mojo quoi. Ce qui inquiète les économistes, c’est quand l’injection de monnaie devient trop massive, au point de faire déborder le moteur : c’est là que l’inflation peut déraper.
C’est pourquoi banques centrales, États et experts s’accordent sur une chose : une inflation modérée, prévisible, autour de 2%, c’est le sweet spot. Ni trop, ni trop peu. Juste ce qu’il faut pour faire tourner la machine sans l’exploser.
Mais voilà, la théorie économique n’est pas toujours raccord avec la réalité du terrain. Beaucoup d’économistes continuent de raisonner avec le modèle des réserves fractionnaires, où la Banque centrale serait toute-puissante sur la masse monétaire. Dans cette vision, si l’inflation explose, c’est que la Banque centrale n’a pas su gérer. Et comme elle est (ou a été) soumise au pouvoir politique, certains en concluent que c’est l’État, via ses déficits publics, qui a déclenché l’incendie.
Du coup ? On milite pour des banques centrales indépendantes, capables de dire « non » aux demandes budgétaires jugées excessives. (cf Trump qui aimerait bien virer Powell, mais il ne peut pas car la FED est indépendante)
Mais ce raisonnement a deux limites majeures :
Ce n’est pas la Banque centrale qui crée la majorité de la monnaie, ce sont les banques commerciales via leurs crédits (coucou la création ex nihilo).
L’inflation ne vient pas que de la monnaie, mais aussi des chocs d’offre, de la spéculation, des tensions géopolitiques, ou des chaînes logistiques qui déraillent.
Bref, inflation et création monétaire ne sont pas liées comme deux aimants. Tout dépend de l'usage de la monnaie, de son partage, de la confiance, de la production disponible... et d'un sacré paquet de nuances.
🌋 Hyperinflation : quand tout s’enflamme, sauf l’économie
Vous avez sûrement déjà entendu parler de l’hyperinflation au Venezuela. Du genre où les prix doublent, triplent, re-triplent en un claquement de doigts.
Alors, la encore, est-ce que c’est la faute de la Banque centrale ? Pas si vite.
En fait, l’économie du Venezuela repose sur deux piliers économiques :
les services pour la population,
et le pétrole pour l’exportation (c’est avec ça qu’ils achètent tout le reste, nourriture incluse).
Résultat : moins de pétrole = moins de devises = moins d’importations = moins de richesses pour les habitants. Et c’est exactement ce qui s’est passé :
la production de pétrole a chuté de 45% entre 2011 et 2019 (infrastructures rouillées, gestion bancale)
le prix du baril est tombé de 125$ à 71$ pendant cette même période, et avec la crise Covid, les prix avaient même baissé encore plus jusqu’à affiché des prix négatifs (sur les futures)
soit un pouvoir d’achat national amputé de presque 70%
Pas de pétrole, pas de chocolat (ni de médicaments, ni de lessive, ni de pain…). Forcément, quand les rayons se vident, les prix s’emballent.
Et même si l’État (oui parce qu’au Venezuela la Banque centrale n’est pas indépendante) imprime un max de billets pour augmenter les salaires, ça ne change rien : 100 personnes qui veulent acheter 50 produits = hausse des prix assurée.
Et comme les salaires suivent (grâce à la planche à billets), les prix grimpent à nouveau. Cercle infernal enclenché…
👉 Moralité : l’hyperinflation au Venezuela n’est pas née UNIQUEMENT d’un excès de création monétaire. Elle vient aussi d’un truc bien plus terre-à-terre : la chute de la richesse réelle produite par le pays.
🥶🔥 Stagflation : quand l’économie cale… mais que les prix s’emballent
La stagflation, c’est quand l’économie fait du surplace, le chômage grimpe… et malgré tout, les prix continuent d’augmenter. Le combo perdant : pas de croissance, mais de l’inflation. Autant dire, le pire des deux mondes.
Comment ça arrive ?
Souvent à cause d’un choc d’offre. Un truc qui fait grimper les coûts de production (coucou le pétrole en 1973), sans que la production suive. Résultat : moins à vendre, mais plus cher.
Et pendant que les prix flambent, les entreprises investissent moins, embauchent moins, et les ménages consomment moins.
Mais les prix, eux, ne ralentissent pas.
👉 Une inflation qui persiste… dans une économie qui déprime.
Pas très sexy, la stagflation. Mais ça vaut le coup de la connaître. Parce que dans l’histoire économique, elle a laissé des traces. Et dans le monde actuel, elle n’est jamais bien loin.
📉 Déflation : quand les prix dépriment
La déflation, c’est l’inverse de l’inflation : les prix baissent. Et sur le papier, ça peut sembler cool. Qui ne voudrait pas d’un panier de courses moins cher chaque mois ?
Mais en réalité, c’est un cercle vicieux redoutable.
Quand les prix baissent :
➡️ les consommateurs reportent leurs achats (« j’attends que ce soit encore moins cher »),
➡️ les entreprises vendent moins, donc elles licencient ou baissent les salaires,
➡️ du coup, les gens consomment encore moins… et les prix continuent de baisser.
Eh oui, si Morgane vend une pomme à 1€ à Jordan, mais que le lendemain elle lui vend 0,9€, pourquoi Jordan n’aurait pas intérêt à attendre pour voir si elle ne va pas encore baisser le prix de la pomme ?
Résultat : une économie qui se fige, des investissements en berne, et une spirale qui peut devenir très difficile à inverser.
Les jouets des Banques centrales
🕹️ Les taux directeurs : le joystick de la monnaie
Si la Banque centrale était une voiture, les taux directeurs, ce serait sa pédale d’accélérateur… ou de frein.
Un petit coup vers le haut ? Ça ralentit l’économie.
Un petit coup vers le bas ? Ça la relance. Simple, non ? Bon, presque.
Mais d’abord, c’est quoi ces fameux taux ?
Les banques commerciales, pour fonctionner, ont parfois besoin d’argent à court terme. Et qui peut leur en prêter ? Leur grande copine : la Banque centrale.
Mais attention, ce n’est pas cadeau. La Banque centrale leur prête à un certain taux, qu’elle décide toute seule : c’est le taux directeur.
Quand la Banque centrale monte ses taux, emprunter devient plus cher pour les banques commerciales.
Du coup, ces dernières revoient leurs crédits à la baisse, ou les rendent plus chers pour les particuliers et les entreprises.
➡️ Résultat : moins de crédits accordés, donc moins d’argent injecté dans l’économie, et donc potentiellement moins d’inflation.
Et à l’inverse, quand la Banque centrale baisse ses taux, le crédit devient plus facile et moins cher.
➡️ Les banques prêtent davantage, la consommation repart, les investissements aussi…
Ce petit levier des taux, c’est donc l’un des outils préférés des Banques centrales pour garder l’économie sous contrôle.
Mais parfois, jouer avec les taux ne suffit plus. Comme lors de la crise des subprimes ou du Covid…
🪂 Quantitative Easing : le dernier (gros) recours
Quand les taux d’intérêt sont déjà super bas (voire à zéro) et que l’économie roupille encore, la Banque centrale sort l’artillerie lourde : le Quantitative Easing, ou QE pour les intimes.
Mais alors, c’est quoi ce bazar au nom barbare ?
Le QE, c’est un plan de relance XXL.
La Banque centrale ne se contente plus de baisser ses taux, elle injecte directement de l’argent dans l’économie en rachetant des actifs financiers (principalement des obligations d’État ou d’entreprises) aux banques et investisseurs.
Conséquences :
Les banques se retrouvent avec plein de cash sur les bras,
Les taux baissent sur les marchés,
Et tout ce beau monde est incité à prêter, investir ou dépenser, plutôt que de laisser dormir l’argent.
Ce mécanisme a été utilisé à grande échelle après la crise de 2008, puis pendant la crise du Covid. Grâce au QE les marchés repartent, les États trouvent des financements pas chers… mais le risque de bulles sur les actifs financiers ou l’immobilier grandit.
Car oui, cet argent injecté ne va pas toujours là où on voudrait. Il peut alimenter les marchés boursiers au lieu de financer l’économie réelle.
Et si tout ça tourne mal, difficile de faire machine arrière sans casse.
Bref, le QE, c’est la perfusion monétaire de l’économie : efficace à court terme, mais à manier avec précaution.
🚁 Hélicoptère money : du cash comme s’il en pleuvait
Imaginez une scène un peu folle : une Banque centrale balance de l’argent depuis un hélico, distribué directement aux citoyens, sans condition, sans crédit, sans contrepartie. Du cash gratos qui tombe du ciel 🤩
Bon, dans la vraie vie, il n’y a pas d’hélico (désolé), mais le concept existe bel et bien : injecter de la monnaie directement dans les poches de la population, plutôt que via les banques ou les marchés.
L’objectif ?
➡️ Stimuler la demande quand plus rien ne fonctionne.
➡️ Et donc relancer la machine économique globale.
Ça peut prendre la forme :
D’un chèque gouvernemental (ex : les “stimulus checks” aux États-Unis)
D’un revenu de base exceptionnel
D’un crédit d’impôt massif
Et là, pas besoin que les banques prêtent ou que les entreprises investissent. On file le cash directement aux gens, qui vont le dépenser comme bon leur semble.
Mais évidemment, il y a débat.
Les partisans y voient un outil de relance puissant et juste, surtout en temps de crise.
Les sceptiques, eux, s’inquiètent d’un effet inflationniste massif si trop de cash circule trop vite.
Bref, l’Hélicoptère Money, c’est un peu le bouton rouge de la Banque centrale. Celui qu’on n’ose pas trop toucher… mais qui fait fantasmer quand tout le reste échoue.
💸 Alors du coup Mojo, la Banque Centrale est-elle vraiment indispensable pour l’économie ?
La monnaie ne pousse pas sur les arbres. Elle est créée en grande partie par les banques commerciales, via le crédit, mais sous l’œil très attentif de la banque centrale.
Cette dernière ne laisse pas les banques faire n’importe quoi : ratios de solvabilité, exigences de liquidité, réserves obligatoires… Tout est calibré pour éviter que la machine s’emballe ou déraille.
L’objectif est d’assurer la stabilité de l’économie.
Et pour ça, elle a tout un arsenal d’outils :
les taux directeurs pour piloter le crédit,
le quantitative easing pour injecter du cash dans les marchés,
l’hélicoptère money (dans les cas extrêmes) pour arroser directement les citoyens.
Bref, la banque centrale, c’est un peu la tour de contrôle du système monétaire. Et maintenant que vous savez comment elle pilote tout ça… on va pouvoir ENFIN s’attaquer à la suite : comment vous, en tant qu’épargnant ou investisseur, pouvez surfer sur ces mécanismes.
Spoiler : ça commence par comprendre comment Trade Republic vous reverse les fruits de cette architecture monétaire 🫣
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